Les risques psychosociaux (RPS) — stress chronique, harcèlement, épuisement professionnel — sont aujourd’hui l’une des premières causes d’arrêts maladie et de désengagement des salariés. Il arrive que le DUERP aborde les RPS de manière succincte, ce qui ne permet pas d’identifier clairement les situations à risque.
Pour un CSE, il est donc essentiel de savoir comment réagir lorsqu’une évaluation RPS est insuffisante, et quelles démarches entreprendre pour obtenir une véritable prévention des risques.
L’article L. 4121-1 du Code du travail précise : « L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. ».
Cela implique trois obligations :
Le DUERP (Document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels) est l’outil central pour formaliser cette démarche. Depuis la réforme de 2022, il doit :
Dans la pratique, l’évaluation des risques psychosociaux est parfois traitée de manière superficielle :
Résultat : un DUERP rédigé de façon trop superficielle n’est pas conforme à la réglementation. Les risques psychosociaux ne sont alors pas réellement pris en compte, laissant l’entreprise exposée à des arrêts longue durée, notamment liés à des burn-outs, ainsi qu’à d’éventuels contentieux.
Les RPS ne se résument pas à l’ambiance ou à la communication interne. Ils tiennent d’abord à la charge de travail, à l’autonomie dont disposent les salariés et au soutien de l’entourage professionnel, mais aussi au manque de reconnaissance, aux conflits de valeurs ou encore à l’insécurité socio-économique.
Le CSE n’a pas à valider le DUERP, mais il doit être consulté lors de sa présentation, conformément à l’article L.2312-8 du Code du travail.
Cette consultation est aussi l’occasion d’examiner spécifiquement la manière dont les risques psychosociaux ont été évalués et pris en compte.
Les élus peuvent ainsi :
Un avis défavorable motivé est un levier puissant :
Par ailleurs, le DUERP doit être tenu en permanence à la disposition des élus du CSE, conformément à l’article R.4121-4 du Code du travail. »
Si le CSE constate qu’un risque grave pour la santé existe (ex : burn-outs répétés, harcèlement non traité), il peut déclencher l’alerte DGI prévue par l’article L. 4131-2 du Code du travail.
Il s’agit d’une procédure en 4 étapes :
Le registre spécial sert à consigner officiellement les alertes de danger grave et imminent. Celui-ci est mis à disposition par l’employeur, mais ce sont les élus du CSE qui y consignent les alertes.
Ce levier doit être utilisé avec sérieux : une alerte infondée peut dégrader les relations sociales. Mais bien utilisée, elle permet d’obliger l’employeur à agir rapidement pour prévenir un drame.
Pour éviter d’en arriver à une crise :
Exemple concret : dans une PME industrielle de 1250 salariés, le DUERP mentionnait simplement “RPS : risque faible”. Or, le CSE avait constaté 14 burn-outs et beaucoup de départs en quelques mois.
Les élus ont rendu un avis défavorable, pointant l’absence de données chiffrées et l’omission de l’évaluation du stress et de l’épuisement professionnel.
L’avis a été inscrit au PV et transmis à l’inspection du travail. Résultat : l’employeur a accepté de financer un diagnostic RPS externe, mené via une enquête anonyme et des entretiens.
Cette démarche a permis d’identifier une surcharge dans deux services et de mettre en place des actions correctives (embauches, régulation des objectifs).
Un diagnostic solide présente plusieurs avantages :
Pour le CSE, un DUERP incomplet sur les RPS n’est pas une fatalité.
Rendre un avis motivé, proposer un diagnostic complémentaire et, en dernier recours, déclencher une alerte « danger grave et imminent » font partie des leviers à sa disposition.
L’enjeu n’est pas de “faire condamner l’employeur”, mais de mettre en place une vraie démarche de prévention qui protège les salariés, réduit les coûts humains et financiers, et renforce la Qualité de Vie au Travail.
Thomas Röhm est co-fondateur de IDTree, la plateforme pour mettre en place votre démarche QVT.